Congo Square

Les premiers êtres humains à peupler cette région étaient les indiens Choctaws. Vinrent ensuite des français qui suivirent La Salle venu en explorateur. Des jeunes femmes, détenues ou prostituées, furent "importées" pour épouser les premiers colons. Afin de pallier l'absence de main-d'œuvre, les premiers esclaves noirs furent débarqués pour être exploités comme l'on sait. Puis ce fut le tour des allemands de se joindre à la colonie.

C'est vers le milieu du XVIIIème siècle que, sous l'influence des traditions catholiques, les premières parades eurent lieu. En effet, les colons avaient besoin de s'octroyer un peu de détente après les travaux de la vie coloniale. C'est ainsi que la musique, la danse et les parades devinrent une institution - un style de vie - en Louisiane. C'est alors que vinrent les espagnols.

 

La population fut multipliée par sept en un demi-siècle et, dans le Nouveau Monde, New Orleans devint la ville où passer du bon temps, le temple du jeu, de l'alcool et du sexe. Cet accroissement provenait aussi de l'arrivée de nouveaux émigrants, notamment les acadiens du "Grand Chambardement", mais aussi d'esclaves libres en provenance de Cuba et Saint-Domingue.

 

 

Le territoire repassera aux mains des français avant de devenir américain. La ville va prospérer et, avec elle, l'activité de son port qui va voir défiler quantité de gens.

 

Les cultures indiennes, latines, anglaises, cubaines, africaines, etc vont se télescoper; la danse va devenir un élément primordial de la vie dans le nouvel Etat. Le métissage va permettre le développement d'une nouvelle classe, les créoles, qui généralement parlent le français.

 

 

Pendant les années qui précèdent la guerre civile, les concerts et les opéras étaient fréquents, la danse était une vrai passion et les célébrations et les festivals abondaient. La moindre occasion était prétexte à une parade, notamment les funérailles. La ville était envahie de musique.

 

En ville, ne pouvant pas, comme dans leurs plantations, être trop sévères avec leurs esclaves, certains maîtres autorisaient leurs esclaves à faire la fête dans leur maison. Ceux qui arrivaient à économiser suffisamment d'argent pour obtenir la liberté avaient l'autorisation de se retrouver pour danser une fois par semaine.

 

 

 

 

Le lieu le plus célèbre était alors le Congo Square, à l'angle des rues Rampart et Orléans, près du Vieux Carré. Dès 1835, chaque dimanche le son des tambours permettait de danser la Bamboula, la Calinda, ou tout autre danse d'origine africaine. Il est probable que cela cachait parfois des cérémonies Vaudou. Ces esclaves ont alors semé les premières graines du futur jazz.

 

 

 

Malheureusement, la guerre civile allait mettre un coup d'arrêt brutal à cette germination, dès 1885. De plus, la ségrégation, jusqu'alors quasiment inexistante, se fit très dure, dans les églises et les écoles d'abord. Les créoles se retrouvèrent, bien sûr, du mauvais côté de la barrière mais, compte tenu de leur éducation et d'une situation sociale relativement correcte, développèrent leur propre groupe social. En conséquence, New Orleans se retrouva avec trois couches sociales distinctes : les blancs, les créoles et les noirs, ces derniers se concentrant dans le Vieux Carré. Cela aura une influence notable sur l'évolution de la musique populaire locale.

 

 

A la fin du XIXème siècle, de nombreux orchestres blancs et créoles faisaient danser la ville ou donnaient des récitals classiques. Les Marching Bands pullulaient et chaque association possédait le sien, notamment dans la communauté noire. Dans les clubs, les gens se retrouvaient après le travail, mais toute occasion était prétexte à jouer de la musique : les bals, bien entendu, mais aussi les pique-niques, les fêtes locales (le Carnaval) ou nationales (la fête du travail, par exemple) et les funérailles. Lors des enterrements, le chariot sur lequel reposait le défunt était généralement accompagné d'au moins un orchestre !

 

 

Les deux Brass Bands les plus réputés des années 1880 étaient l'Excelsior et le Onward Brass Band. L'Oriental Brass Band fut constitué en 1886.

 

Les instruments utilisés provenaient souvent des orchestres militaires qui étaient dissous à New Orleans, et revendus dans les boutiques d'occasion. Les néo-orléanais étaient alors familiarisés avec ces parades et s'intégraient joyeusement au défilé en criant, chantant et tapant sur toutes sortes de percussions.

C'est la fameuse "deuxième ligne".

 

 

 Un autre élément sera déterminant dans l'évolution de la musique. Le 1er janvier 1898, les autorités de la ville interdisaient le jeu et la prostitution à l'extérieur d'un quartier bien délimité de 38 blocks au nord du Vieux Carré. Cet endroit fut vite baptisé "Storyville", du nom de l'auteur du décret, Alderman Story. Pendant vingt ans, les boites, les bars, les maisons de jeu et les bordels vont se multiplier… et la demande de musiciens avec ! Leur fonction consistait à mettre le consommateur en situation de dépenser le plus d'argent possible (jeu, femmes, alcool).

Il y avait des orchestres complets, dans les cabarets, des petites formations (souvent des trios) dans les bordels, mais aussi des solistes - pianistes , en fait - dans les endroits plus étriqués. Ces pianistes - qui seront appelés "Professors" - vont développer des styles bien spécifiques et intégrer le ragtime.

Storyville fut fermé en 1917, l'armée ayant interdit tout alcool et prostitution dans un rayon de cinq miles autour d'une base navale.

 

 

 

C'est ainsi qu'à Storyville, aussi bien que dans les parades, les funérailles et les 'riverboats', la musique que nous appelons jazz a pris naissance.